lundi 19 décembre 2011

Bien-être / bien vivre au travail : un enjeu majeur qui implique un questionnement de l’entreprise dans son ensemble


Les évolutions sociétales, culturelles, économiques entraînent inévitablement des changements de la vie en entreprise : des modes de fonctionnements, de relation, de management, de communication qui savent ou non s’adapter de manière humainement écologique, impactant le bien ou le mal être en milieu professionnel.

Contrairement à l’idée encore couramment véhiculée selon laquelle « il faut laisser ses états d’âme à la porte de l’entreprise » les personnes arrivent au travail avec leurs envies, leurs besoins, leurs peurs, leurs valeurs, leurs sources de motivation ou leurs conflits intérieurs. Par définition, l’individu étant « indivisible » il ne saurait se séparer de ce qu’il est, de ce qu’il vit, de ses émotions, de ce qui l’émeut, le touche ou le rebute au prétexte qu’il est sur son lieu de travail.

Ainsi, la recherche naturelle et biologique d’homéostasie et d’évitement de la souffrance propres aux êtres vivants nous impacte tout au long de notre journée, au travail et ailleurs, quelle que soit notre fonction. Et cette programmation nous amène à nous comporter la plus grande partie du temps selon un mode de « pilotage automatique ».

C’est pourquoi les notions de bien-être et de bien vivre au travail sont-elles à la fois plus complexes et plus simples qu’il n’y paraît. Elles sont en tous cas un enjeu majeur aujourd’hui pour les entreprises qui ont à cœur de :
  • Recruter des collaborateurs investis
  • Fidéliser leurs personnels (notamment parmi la génération Y plus exigeante et plus volatile)
  • Rassurer leurs clients (de plus en plus sensibles aux actes congruents avec les valeurs affichées)
  • S’impliquer dans une vision de RSE

Mais gardons-nous des solutions rapides, des mesures « cosmétiques » qui donnent bonne conscience aux structures qui les pratiquent et n’ont que des effets limités voire contre-productifs (voir article "Prime au présentéisme").

S’intéresser au bien-être au travail pour une entreprise est une démarche de fond qui doit poser des questions et des remises en question. Les seules mesures de confort parfois mises en œuvre pour les personnels, pour appréciables qu’elles soient, ne suffisent jamais à assurer un bien-être réel et durable s’il n’y a pas préalablement d’harmonie globale installée, du sens partagé, une approche très précise de compréhension et de considération des éléments humains, des comportements, de la psychologie et de la sociologie. 

Certaines d’entreprises, réellement désireuses d’œuvrer positivement et activement pour une amélioration du bien-être au travail, tentent des actions parfois coûteuses qui ne donnent pas toujours les résultats escomptés. Cela génère alors de l'insatisfaction et souvent une aggravation des phénomènes délétères.

Prenons deux exemples concrets : 





  •  Une PME commercialisant des outils de contrôle et de distribution de boisson a mis en place depuis un an des séances régulières de massage assis et de relaxation pour ses salariés. Après quelques mois, l’équipe dirigeante s’étonnait de constater malgré tout la poursuite de l’augmentation du stress déclaré et la démotivation fortement perceptible dans les équipes. Pour cette PME, l’action représente un coût important. L’effort est louable mais n’atteint pas son but.

Ce résultat décevant a créé beaucoup de frustration de part et d’autre : les dirigeants affirmaient que décidément « on a bien raison de penser que plus on leur en donne, plus ils en demandent » et que finalement « ça fait l’effet inverse, les gens sont encore moins motivés ! Ils ne veulent plus travailler aujourd’hui ». Un effet Pygmalion était à l’œuvre. Quant aux employés ils se désengageaient effectivement davantage, déplorant qu’on « ne s’attaque pas aux vrais problèmes » et que « de toutes façons c’est comme ça et ça ne changera jamais ».

Après avoir interrogé salariés et managers il apparaît que, certes, les massages et la relaxation permettent de détendre le dos et les contractures mécaniques et d’apaiser les tensions sur l’instant. Mais il n’y a aucune perception d’une amélioration réelle du bien-être au travail lié aux conditions d’exercice des opérations.

Une investigation plus approfondie montre que le climat dans l’entreprise est déséquilibré et que certains services sont au bord de l’implosion : une stratégie peu lisible par les managers et les employés, des objectifs confus et contradictoires, souvent éloignés des réalités de terrain. Il en résulte des plannings d’intervention sans cohérence, des actions désordonnées, une perte d’énergie et de chiffre d’affaires, un manque de reconnaissance des efforts fournis, des conflits internes, un sentiment d’inutilité croissant et un stress grandissant chez les collaborateurs et les managers démunis.

Cet exemple montre combien le bien-être au travail mérite que l’on envisage la santé de l’entreprise de manière « holistique ». Ici, le rétablissement du bien vivre au travail et du bien travailler nécessite une remise en question globale et profonde pour faire évoluer les représentations de part et d’autre, les processus de fonctionnement concrets et les modes relationnels, un accompagnement systémique pour restaurer la confiance, la reconnaissance réciproque, recréer du collectif, un sentiment d’appartenance et de fierté.

  •  Second exemple : une association qui demande à ce que son personnel d’accueil soit formé à la gestion des conflits. Il semble que de plus en plus de conflits aient lieu à l’accueil : augmentation des incivilités, des exigences, des impatiences…

L’interlocuteur indique qu’un effort permanent est fait pour la formation des personnels. Il est important dit-il que les personnes puissent se sentir bien dans leur fonction, compétents et préparés. Cela fait partie du bien-être au travail.

La stratégie mise en œuvre par l’association met l’accent sur « la satisfaction client ». Parfait. Le critère principal ? Le temps d’attente qui doit être inférieur ou égal à 3 minutes.

Parallèlement à cela, de gros investissements sont faits pour favoriser la dématérialisation. Ainsi, il est possible d’effectuer un grand nombre d’opérations sur la plateforme web de l’association. Du coup, ne se déplacent à présent à l’accueil que les personnes qui n’ont pas accès aux services dématérialisés : personnes en difficulté, personnes âgées, personnes en situation de précarité.

Alors le critère principal de satisfaction client n’est plus pertinent : en effet, le type de population qui se arrive à l’accueil est une population fragilisée qui demande au contraire que l’on prenne le temps de l’écouter, de lui donner de la considération et de la reconnaissance ! Le temps d’attente n’est plus qu’un critère secondaire. Les personnels sur le terrain, tentent d’expliquer le phénomène à la hiérarchie et de démontrer la nécessité de modifier certains critères et que l’on cesse de leur mettre la pression pour qu’ils réduisent leur temps d’accueil. En vain.

 De plus, par décision là encore « stratégique » les réponses données aux adhérents sur certains sujets sont volontairement imprécises (donc peu rassurantes), l’association cherchant à se protéger en cas d’erreur, de changement ou de retard.

Ainsi, l’on crée ici, par manque d’écoute, des occasions de conflits démultipliées que l’on tente de résoudre non pas en s’interrogeant sur le système, mais en s’attachant à des causes immédiates qui n’expliquent pas tout : la montée des incivilités.

Ces deux exemples illustrent que bien-être et bien vivre au travail se tricotent dans une cohérence au quotidien qu’il faut construire si elle n’existe pas.

 Le manque de sens perçu dans une stratégie, la désorganisation, le manque d’écoute des équipes de terrain, les a priori idéologiques sont autant d’éléments déstabilisants, facteurs d’angoisse et de démobilisation contraire au bien-être. Il n’est pas facile de se remettre en question, de remettre en question un système surtout lorsque « on a toujours fonctionné comme ça, et ça a toujours bien marché ». Dans un contexte sociétal et économique mouvant, incertain et difficile à prévoir, le réflexe est souvent de résister, de se replier sur l’habitus, sur des croyances ancrées (individuelles et collectives) et de chercher des solutions sans rien changer véritablement.

Le bien-être et le bien vivre au travail dépendent de la culture d’entreprise, des modes de fonctionnements stratégiques, managériaux, organisationnels et de communication. Mais ils sont également liés à la responsabilité de chacun dans sa représentation (du monde, de soi, de l’autre, des fonctions, de l’entreprise…) et dans ses modes relationnels. Travailler à être bien est aussi une partie du bien-être au travail. Recréer du collectif à partir d’un travail individuel et de petits groupes, de la cohésion de l’envie et du plaisir de « faire ensemble », de célébrer, en passant parfois par des projets en marge de l’activité de l’entreprise, mobilisant les énergies et les motivations sur des actions transversales ayant du sens, de l’utilité, pour lesquelles chacun se sent important et responsable. Ou chacun apprend à se demander ce qu’il peut apporter plutôt que ce qu’il peut attendre.

L’entreprise apprenante dans sa globalité semble bien être une des clés du bien vivre au travail.


jeudi 17 novembre 2011

La prime au « présentéisme » : dans les collectivités ou dans le privé, une fausse solution qui contourne les racines du problème


Dix-neuf communes de l'Hérault ont décidé d'octroyer une prime au "Présentéisme" aux agents qui font preuve d’une assiduité stable.

L'objectif est de réduire l'absentéisme important qui semble être un dysfonctionnement récurrent dans certaines collectivités, avec une « carotte » allant de 350 à 600 €.

En dehors de toute position idéologique ou politique (Profil-Leader ne défend jamais aucun parti ni étiquette, et par ailleurs, la mesure a été adoptée par des collectivités de tous bords), il est intéressant d'analyser avec l’œil professionnel de Profil-Leader cette solution qui vient d'être adoptée.

Si l’intention est sans nul doute positive, la solution nous semble être néanmoins une erreur managériale sur plusieurs plans :

Un mot à double sens :
En effet, le mot « Présentéisme », compris ici comme le contraire de l’absentéisme, signifie, en psychologie du travail  « Faire acte de présence, sans avoir la productivité attendue ». Autrement dit, le collaborateur est présent sur le lieu de travail, certes, mais il n’assume pas réellement ou pas intégralement sa mission. Ainsi, donner une prime au présentéisme pourrait être interprété comme « il suffit donc d’être présent, pas forcément de travailler ».
Une action souvent contre-productive :
L’idée n’est pas neuve, loin s’en faut. Souvent testée dans d’autres organisations, notamment privées,  elle aboutit à un fréquent  effet pervers : elle officialise un système. La présence régulière et assidue au travail peut ainsi devenir une « option » que l’on choisit, ou pas. Les collaborateurs estiment tacitement avoir le droit de choisir de bénéficier ou non de la prime. Certains pourront alors décider de renoncer à cette prime et ne plus hésiter à s’absenter. A l’inverse, d’autres collaborateurs ayant réellement besoin d’un arrêt de travail mais comptant beaucoup sur la prime viendront travailler même très affaiblis et risquant un arrêt de travail plus sérieux.    
Une solution de facilité qui contourne les vrais problèmes :
En réalité, cette option ne permet pas s’interroger sur les causes réelles de l’absentéisme. Celui-ci est pourtant le symptôme d’un dysfonctionnement. Il serait nécessaire de réfléchir sur l'évolution de l'organisation souffrant d'absentéisme :
·        Remettre en question d’éventuelles pratiques managériales inappropriées qui conduisent à une démotivation.
·        Faire évoluer une culture d’entreprise dépassée qui amène souvent à travailler, au sein des institutions, pour la hiérarchie et non pour le public.
·  Travailler et accompagner les sources intrinsèques de la motivation humaine des collaborateurs. Se contenter d’activer un levier extrinsèque n’a toujours qu’une efficacité limitée dans le temps.

Pourtant, il est fréquent de conclure rapidement que l’absentéisme est dû au confort du statut de fonctionnaire. Cependant, bien des entreprises privées connaissent aussi le phénomène d’absentéisme alors même qu’elles disposent d’outils de motivation extrinsèques. Et par ailleurs, même si le statut de fonctionnaire peut amener parfois des abus, rappelons que tous les fonctionnaires ne sont pas les tires-aux-flancs que l’on se plaît parfois à caricaturer, mais que beaucoup assument leur mission avec compétence et dévouement au Service Public.

Dans le cas présent, il est à craindre que cette mesure de prime à la présence renforce l’image du fonctionnaire désinvolte, en faisant peser sur ses seules épaules la responsabilité de l’absentéisme, ce qui n’est pas tout à fait juste.

Lorsque l’indicateur « absentéisme » est en alerte, la pratique managériale mérite toujours d’être questionnée, même si l’agent ou le collaborateur qui recourt à l’absentéisme comme échappatoire a aussi sa part de choix à interroger. Notre expérience de travail avec les collectivités territoriales et de situations de management étonnantes que nous y rencontrons parfois nous amènent à engager chaque institution à se poser les questions suivantes :

·         Quelle est la culture managériale de la collectivité ?
·         Les directeurs, cadres, chefs de services sont-ils suffisamment formés ?
·         Y-a-t-il une harmonisation des pratiques ?   
·         Des objectifs clairs et réalistes sont-ils posés aux collaborateurs ?
·    Les actions demandées aux agents ont-elles du sens pour eux ? Sont-elles reliées à des missions cohérentes ?  
·       Les directeurs et chefs de services accompagnent-ils la montée en compétences des agents ?
·         Pratiquent-ils une écoute des agents de terrain ?
·         Favorisent-ils réellement l’autonomie des agents ? Et comment ?
·         La formation est-elle encouragée ?
·         Y-a-t-il une valorisation perçue par les agents de leur travail ?
·         Des réunions sont-elles organisées régulièrement ? De façon cadrée et productive ? Avec un but précis et défini ?
·         Existe-t-il une relation équilibrée entre les directeurs et l’équipe politique ?
·         Les élus restent-ils à leur place d’élus ? Ou bien prennent-ils parfois la place des directeurs en donnant des consignes, contredisant même les orientations données par les directeurs ?
·        
Autant de questions qui, sans aucun doute, demandent de prendre du temps, et de se donner les moyens de l’accompagnement d'un changement. Car ce questionnement amène d’inévitables évolutions, avec leur cortège de résistances transitoires naturelles : « ça peut pas marcher chez nous » ; « on a déjà essayé tout un tas de choses, mais il n’y a rien à faire » ; « dans les collectivités, c’est spécial » ; « on ne peut pas changer la nature humaine »...

Ainsi les premiers à résister aux changements nécessaires sont-ils souvent les intéressés eux-mêmes : agents, responsables hiérarchiques, élus. Et dans les entreprises privées, les managers et dirigeants.

La première résistance au changement est le refus même du questionnement des pratiques, le recours à des solutions qui semblent vertueuses et efficaces mais qui laissent parfois un goût amer.

mardi 1 novembre 2011

Gratitude et reconnaissance : des éléments de bien-être social très simples à mettre en oeuvre

La relation dans l'entreprise ne se résume pas à la réalisation d'un contrat de travail. La reconnaissance fait partie de besoins humains fondamentaux, même en milieu professionnel. La gratification financière n'est qu'une des multiples formes que peut prendre la reconnaissance, il en existe beaucoup d'autres, simples, dans des petits actes du quotidien . Cela commence par "Bonjour Michel", "Bonjour Elsa"... reconnaître l'autre dans ce premier mot du matin accompagné du prénom, du regard, du sourire. Pas un bonjour distrait ou conventionnel. Un "merci" après une action, même si elle fait partie intégrante de la fonction et n'a rien d'exceptionnel.
Célébrer les petites victoires et les grands succès, donner de l'écoute et de l'attention à des choses dont "c'est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup"... Bien des actions peuvent être concrètement et facilement mises en oeuvre en termes pour exprimer de la reconnaissance.

Bien sûr, reconnaissance et gratitude, doivent être sincères. Car une reconnaissance affectée et manipulatoire aura des effets de distanciation et de perte de confiance. La sincérité est la première des conditions.

La reconnaissance est, dès la naissance, un élément majeur dans la construction de la personnalité, de la confiance en soi et en l'autre. Et il est aussi important d'en recevoir que d'en exprimer. En effet, les chercheurs ont aussi démontré qu'exprimer sa reconnaissance ou sa gratitude permet à celui qui l'exprime d'augmenter son propre bien-être. Les personnes spontanément reconnaissantes sont majoritairement plus optimistes, plus énergiques, plus sociables.


"La gratitude est un sentiment de reconnaissance vis-à-vis d’autrui. C’est une construction sociale où un événement positif, qui améliore le bien-être psychologique du bénéficiaire, est dû à une personne qui a agi intentionnellement à cet effet.
La gratitude est un vecteur de bien-être social. Imaginons un enseignant qui consacre de nombreuses heures à la réalisation d’une comédie musicale avec ses élèves pour améliorer l’ambiance dans la classe ou pour que ces élèves aient plaisir à venir au collège. Si les parents ou les élèves ne lui renvoient aucun signe de gratitude, des tensions risquent de se faire jour. À l’inverse, s’ils le remercient ou lui offrent un présent collectif, cela créera un lien social positif. " - Rébecca Shankland maître de conférences en psychologie clinique, dans le Laboratoire inter universitaire de psychologie, personnalité, cognition, changement social, EA 4145, Université Grenoble 2.
 http://www.cerveauetpsycho.fr/ewb_pages/f/fiche-article-gratitude-et-bien-etre-24062.php

Petits éclats de reconnaissance

Responsabilité sociale des entreprises: une nouvelle stratégie de l'UE pour la période 2011-2014 - Médiaterre Responsabilité sociétale

Aller plus loin que les obligations légales en matière de responsabilité sociale des entreprises ?

Responsabilité sociale des entreprises: une nouvelle stratégie de l'UE pour la période 2011-2014 - Médiaterre Responsabilité sociétale

lundi 24 octobre 2011

Créer une chorale dans l'entreprise : La musique améliore les performances cognitives et la cohésion, que l’on soit musicien ou non !

Si la simple écoute musicale (qui plus est d’une musique que l’on apprécie) ouvre nos capacités cérébrales sur le court terme, les neurosciences démontrent aujourd’hui que l’écoute et/ou la pratique d’un instrument ou du chant a une action durable sur nos performances. Il semble qu’il s’effectue un transfert entre les capacités musicales et les compétences cognitives autres que  musicales, la musique favorisant des connexions de différentes zones cérébrales.

Depuis une dizaine d’années, les neurosciences confirment que la musique agit comme un neurostimulateur. Ainsi, que l’on soit musicien ou non, la simple écoute ou la pratique régulière de la musique ou du chant :
La montée en compétences, la motivation et la cohésion par le chant
  • Renforce la plasticité cérébrale
  • Améliore la mémoire
  • Consolide les capacités d’apprentissage (notamment des langues)
  • Développe la capacité créative
  • Favorise l’intelligence émotionnelle et l’empathie 
  • Facilite la concentration et le raisonnement
  • Apaise le stress
  • Ralentit le vieillissement cognitif

Une chose est donc certaine aujourd’hui pour les scientifiques : la musique est bien plus et autre chose qu’un simple loisir ou même qu’un art comme un autre. La force de la musique est proprement extraordinaire dans ses effets sur l’humain. Elle est même davantage qu’un fabuleux outil d’expression émotionnelle. Elle touche en effet la profondeur de notre cerveau en reliant et « orchestrant » l’activité de nombreux circuits corticaux. C’est cette stimulation de diverses zones  du cerveau interactives qui explique le développement et le maintien des performances cognitives y compris pour des compétences non forcément musicales.

L’imagerie médicale a même montré que la musique stimule certaines zones cérébrales au même titre que la prise de drogue ou l’activité sexuelle. A l’inverse, elle apaise les zones activées par les émotions négatives.

Pour bien comprendre que nous sommes tous potentiellement concernés et susceptibles de bénéficier des bienfaits cognitifs et émotionnels de la musique, il faut souligner la capacité humaine d’apprentissage implicite (c’est-à-dire inconscient) de la musique. 
La seule écoute par une personne novice, non formée à la musique, permet d’intégrer des repères sonores et rend le cerveau musicien : fausses notes, variations, suite mélodique…  Savoir cela permettra sans doute à beaucoup de personnes de dépasser les peurs et les réserves habituelles : « Je ne connais pas la musique. » « Je ne sais pas chanter ». En vérité, nous sommes experts sans le savoir, et depuis toujours. Les bébés, dès les premiers babillages ou les pleurs, cherchent à reproduire la prosodie (la mélodie) du langage entendu dans leur environnement, avant même de comprendre le sens des mots.

La musique a donc un impact profond sur l’humain, de manière universelle dans tous types de cultures et de sociétés. Non seulement un impact sur certains processus cognitifs de traitement de l’information musicale mais également sur les états psychologiques, émotionnels et physiologiques. « La musique peut mettre à l’unisson émotionnel une foule entière. Ce pouvoir lui confère une force de cohésion sociale essentielle dans la plupart des cultures du monde » (Emmanuel Bigand*).

Cette fonction émotionnelle s’exerce tout au long de la vie et de manière commune dans les ressentis : une même musique suscite le même type d’émotion, là encore que l’on soit musicien ou non.

Et que dire des bienfaits de la musique et du chant sur l’apaisement du stress ! Les expériences montrent que l’écoute de musiques relaxantes diminue la concentration du cortisol (hormone du stress) dans le sang. Attention cependant au type de musique : Mozart aide à l’apaisement, la techno a l’effet inverse, même si l’on en apprécie le style.
Musique, chant et qualité de vie au travail : un lien réel

Ce que soulignent et démontrent scientifiquement les chercheurs aujourd’hui est vécu empiriquement (consciemment ou non) par tous les amateurs de pratiques musicales. Et nous le constatons nous-mêmes dans notre accompagnement de chorales d’entreprises : quel outil fantastique de cohésion et de consolidation du sentiment d’appartenance !  L’engouement de plus en plus répandu du chant et des chorales en milieu professionnel n’est pas une mode. Le plaisir de chanter permet de développer une pratique bénéfique et profitable à tous, individus, équipes et entreprise ! Partout où nous  coachons et entraînons les chorales qui se mettent en place nous constatons une forte amélioration de la qualité de vie au travail, de l’harmonie relationnelle, un apaisement des tensions et une augmentation des relations collaboratives et transversales. Et reprécisons une nouvelle fois qu’il n’est nul besoin de « savoir » chanter pour chanter. Rencontrons-nous, parlons, puis chantons ensemble !

L’article ci-dessus s’appuie sur les études et travaux des chercheurs suivants :
-Emmanuel Bigand, professeur de psychologie cognitive, membre de l’Institut Universitaire de France, Directeur du laboratoire de l’étude de l’apprentissage et du développement à l’Université de Bourgogne à Dijon.
Stéphanie Khalfa, chargée de recherches à l’Institut des Neurosciences de la Méditerranée à la Faculté de Médecine de la Timone
-Séverine Samson, neuropsychologue - Hôpital Salpêtrière à Paris
-Olivier Sacks, neurologue, professeur de neurologie et psychiatrie à l’Université de Columbia (Etats Unis)


lundi 17 octobre 2011

Les femmes sont-elles le rempart anticrise ?

Il semble que les grandes entreprises qui confient de hautes responsabilités à des femmes s'en sortent plutôt mieux que les autres :

"Plus prudentes et altruistes, les dirigeantes défendent mieux la santé de leur entreprise en période de récession que leurs homologues masculins..."

Lire l'article

lundi 10 octobre 2011

"Le désamour du travail touche bien plus que 30% des salariés"

"Un phénomène qui s'accompagne d'une chute de la satisfaction au travail. Selon l'enquête, le taux de salariés se déclarant "satisfaits" est en effet passé de 72% à 57%, entre 2007 et 2011. Ce désamour des salariés trouve son origine dans la crise financière et dans les méthodes actuelles de management."

Voir l'interview
http://lexpansion.lexpress.fr/carriere/le-desamour-du-travail-touche-bien-plus-que-30-des-salaries_263067.html

dimanche 9 octobre 2011

Neurosciences : Les signaux de la communication non verbale favorisent la cohésion, motivation, créativité et influencent la prise de décision


Intelligence… : étymologiquement inter (entre) ligere (choisir, cueillir, lire) : « faculté de lire/choisir entre,  lire l’autre et soi-même ».

C’est la compréhension des fonctionnements biologiques et neuronaux conjuguée à des années de recherche en psychologie sociale qui ont permis de montrer la grande influence des signaux non verbaux sur les comportements des individus et des groupes sociaux.

Vraisemblablement apparue au cours de l’évolution avant le langage parlé, l’émission de signaux sociaux non verbaux permettait déjà aux ancêtres de l'Homme de prendre des décisions et de coordonner des stratégies d’action efficaces pour se nourrir.

Les signes sociaux non verbaux sont les expressions, intonations, gestes qui constituent, hors langage parlé, un système de communication fiable entre les êtres. L’interprétation de ces signes est permise par notre capacité de mimétisme (c’est la fonction des neurones miroirs) et d’empathie. Cette faculté d’imitation se développe dès les premiers échanges entre le nourrisson et son entourage.

Même si les cours de communication et les techniques de vente intègrent depuis déjà des décennies la dimension « non verbale » des échanges, ils sont encore loin de leur accorder l’importance et surtout les preuves que les travaux scientifiques actuels mettent en lumière.

L’influence de cette dimension, que jusqu’alors l’on soupçonnait, est à présent démontrée dans des domaines aussi déterminants que la prise de décision, le management d’un groupe (charisme), la négociation.

Les études neuroscientifiques prouvent que les signaux non verbaux augmentent la force de persuasion, la cohésion, la motivation des individus et groupes sociaux, grâce à l’empathie développée. Ainsi l’observation, par les groupes d’études scientifiques équipés d’outils sophistiqués, des différents degrés de mimétisme (ce que l’on appelle aussi la « synchronisation ») des protagonistes de négociations commerciales leur permettaient de prédire efficacement l’issue de celles-ci. Pour en savoir plus, cliquer ici

Cette influence semble d’autant plus forte qu’elle est la plupart du temps inconsciente, non liée à la raison ou à la logique et s’opère aussi bien dans les situations du quotidien que dans les moments à forts enjeux.

L’apprentissage par imitation de modèles est ce que nous faisons depuis l’enfance avec nos plus proches. L’humain étant un être hautement social, les liens avec ses semblables lui sont indispensables. Ainsi, plus un groupe est uni, plus il développe solidarité, partage d’informations, de savoirs, d’attitudes, d’habitudes. Et plus cette cohésion est importante, plus la productivité augmente.

Par ailleurs, il semble que l’abondance de signaux sociaux de structure variée, échangés dans un ou plusieurs groupes, optimise la production d’idées et favorise la créativité.

Insistons encore sur l’effet de « contagion » des signes non verbaux en prenant l’exemple de l’état d’humeur et d’énergie positive que peut communiquer une seule personne à son environnement en quelques secondes. L’imitation des signaux, pour inconsciente qu’elle soit, permet d’instaurer alors un climat enthousiaste et stimulant, là aussi propice à la cohésion, à l’action et au succès.

Toutes ces avancées corroborent les éléments que nous avions précédemment cités sur l’intelligence collective comme étant améliorée dans les groupes à fortes sensibilité sociale et à temps de parole bien répartis.

Pour aller plus loin, cliquer ici

Sources : travaux d’Alex Pentland, professeur au Massachussetts Institute of Technology, Directeur du laboratoire des dynamiques humaines « Honest signals : how they shape our world » (MIT press, 2008) – M. Buchanan : « Secrets signals : does a primitive, non linguistic type of communication drive people’s interactions ? »

samedi 24 septembre 2011

Adapter les horaires de travail aux chronotypes des collaborateurs ?

Toutes les études dont nous disposons aujourd’hui confirment le rôle majeur du sommeil dans les capacités cognitives.

- Mémoire : mémoire immédiate, mémoire de travail
- Concentration : vigilance, qualité, exécution des procédures, habileté, précision
- Raisonnement : prise de décision
- Humeur / stress
- Apprentissage


Pendant notre phase de sommeil profond, nous consolidons les apprentissages de la journée, nous traitons les informations perçues, les souvenirs, en différé. De minuscules lésions cérébrales se réparent, et le bon fonctionnement des neuromédiateurs est restauré. Et si le sommeil est perturbé, le processus cognitif l’est également.

Le sommeil est nécessaire au fonctionnement de la pensée et de l’apprentissage. Le sommeil nocturne, bien sûr. Mais également les séquences diurnes : la sieste constitue un réel bénéfice pour la performance cognitive.  Une étude menée par la NASA  a montré qu’une sieste de 26 minutes améliore la performance des pilotes de plus de 34 %. D’autres chercheurs ont également montré qu’une simple sieste d’une trentaine de minutes permet d’améliorer la qualité cognitive, le rythme de travail et la mémorisation. A l’inverse, le manque de sommeil répété altère les fonctions cognitives, augmente la sécrétion de cortisol (hormone du stress) et diminue les capacités de raisonnement.

Certaines entreprises, aux Etats Unis (Nike par exemple), en Chine mais aussi en France ont bien compris l’intérêt de permettre ces courtes séquences de récupération et ont installé des espaces de repos.

Les scientifiques distinguent les chronotypes, c'est-à-dire des profils circadiens et des spécificités individuelles du rapport au sommeil et à l’activité :

Les chronotypes du matin sont à l’optimum de leur performance en fin de matinée, jusqu’à midi. Ils se réveillent souvent seuls (sans sonnerie) vers ou avant 6h du matin. Ils éprouvent le besoin de dormir aux alentours de 21h.

Les chronotypes du soir quant à eux  sont au top de leur productivité à partir de 18h. Ils ont du mal à aller dormir avant 3h du matin et à se lever avant 10h.

Ces deux types de profils circadiens représentent environ 34 % de la population.

Les 66 % restant oscillent de façon plus neutre entre ces deux chronotypes, en étant « plutôt du matin » ou « plutôt du soir ».

Lorsque l’on sait qu’aux Etats Unis le manque de sommeil coûte 100 milliards de dollars aux entreprises (sans parler du coût humain), on peut se demander quels sont les chiffres pour la France où le déficit de sommeil tend à devenir un problème de santé publique.

Pourrait-on alors imaginer une adaptation des horaires de travail des collaborateurs aux chronotypes ? Il est de nombreuses fonctions pour lesquelles cette souplesse serait possible : services informatiques, administratifs… Certains secteurs de la production industrielle pratiquent déjà des horaires décalés. Mais il s’agit alors de répondre aux impératifs de l’organisation, non pas de prendre en compte les chronotypes des personnels. Il y aurait pourtant un intérêt pour tout le monde (collaborateurs et entreprises) à instaurer de nouvelles mesures dans ce sens chaque fois que c’est possible. Bien sûr, il est peut-être difficilement envisageable d’aller visiter un client B to B entre 18h et minuit. Encore que… Ne pourrait-on envisager des rencontres du troisième… chronotype !

Revue « Pour la Science » n° 315 (« Les clés du sommeil ») et n° 382 (« La sieste est-elle nécessaire ») Delphine Oudiette, doctorante en neurosciences dans l’Unité des Pathologies du sommeil de la Pitié-Salpêtrière, à Paris.



mardi 13 septembre 2011

Le sport améliore la santé et… les performances de notre cerveau

Malgré l’influence de Descartes, on savait empiriquement de longue date (et Spinoza s’est plu à l’expliquer) que corps et esprit sont indissociables.

Les études épidémiologiques ont montré depuis les années 60 qu’une activité sportive régulière est bénéfique sur la santé mentale et sur la santé globale. L’influence du corps sur l’esprit… et inversement.

Si l’activité physique a largement contribué au développement du cerveau humain au cours de son évolution, l’imagerie médicale permet aujourd'hui d’en prouver les bienfaits majeurs, rapidement capitalisables.

En effet, une pratique sportive régulière et raisonnable (environ 30 à 40 minutes 3 fois par semaine) :

- Régule le stress et diminue l’anxiété
- Renforce la plasticité cérébrale (capacité d’apprentissage)
- Facilite la création de nouveaux neurones (tout au long de la vie !)
- Stimule et améliore les fonctions cognitives
- Agit positivement sur l’humeur
- Augmente les capacités de mémorisation

Autant d’éléments et de qualités aussi utiles pour la collaboration en entreprise que pour le bien Etre Humain en général.
Etre « bien dans ses baskets » n’a jamais eu un sens aussi concret !

Pour en savoir plus :
« Effets de l’exercice physique et de l’entraînement sur la neurochimie cérébrale. Conséquences comportementales ». Charles-Yannick Guezennec (Annales médico-psychologiques, 942, 1, 2008)
« Activité physique, contextes et effets sur la santé ». Expertise collective, Les Editions de l’Inserm, 2008.
« Les dossiers de la recherche » n° 40 (Août 2010).

 Réseau de neurones :




mercredi 7 septembre 2011

Dans un groupe de travail, la présence des femmes et la manière d’interagir font croître l’intelligence collective

C’est ce que démontrent les travaux d’une équipe de psychologues de l’Université de Pittsburgh sous la conduite de la chercheuse Anita Woolley1.

L’étude parue fin 2010 dans la revue Science indique que l’intelligence collective dépend moins des intelligences individuelles que des trois autres facteurs déterminants suivants :


- La sensibilité sociale des membres du groupe
- L’égalité dans la répartition des temps de parole
- La présence de femmes

Les groupes dans lesquels la parole est monopolisée par une ou deux personnes sont globalement moins productifs d’intelligence collective que ceux où la parole est plus largement répartie (et où une pluralité d’idées peut s’exprimer).

Ce qui est entendu ici par « sensibilité sociale », c'est la faculté de percevoir et d’interpréter sur les visages et dans les regards l’humeur, l’état d’esprit, l’approbation ou la réticence des interlocuteurs. Dans de précédentes études menées, les femmes avaient des scores supérieurs de sensibilité sociale. 

L’équipe de Pittsburgh explique que, si bien évidemment l’intelligence individuelle est nécessaire à l’intelligence collective, le mode d’interaction relationnelle dans un groupe est réellement déterminant. 

La conclusion encourageante de l’étude est qu’il pourrait être plus facile d’améliorer (et d’évaluer) l’intelligence et la performance du groupe que celle des individus, simplement en améliorant la manière de communiquer et d’interagir au sein d’un groupe, équipe de travail ou entreprise dans son ensemble.

1Woolley AW, Chabris CF, Pentland A, Hashmi N, Malone TW. “Evidence for a collective intelligence factor in the performance of human groups”. Science 2010 Oct 29